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Pierrot de Lune
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8 mai 2017

L’absence

Qui est donc cette petite fille en tutu qui pose pour cette photo en noir et blanc légèrement jaunie ?

Et ces adultes endimanchés debout le long d’un muret surplombant un cours d’eau ? Ils ont un air bien sévère !

Et ces messieurs moustachus, fiers et dignes dans leur costume de cérémonie ?

Encore la petite fille, ses longs cheveux bruns, tirés par un serre-tête, reposent sur ses épaules et elle tient par la main une grande dame en tailleur, un chapeau légèrement incliné sur le sommet de la tête.

Ici un monsieur au costume clair qui sourit à la dame en tailleur sauf qu’elle porte un imperméable.  Elle porte toujours le même chapeau.

Une petite maison à la façade blanche devant laquelle un homme et une dame âgés se tiennent côte à côte sur un banc en bois.

Tiens, voici à nouveau la petite fille.  Cette fois, elle porte un tablier et des rubans ornent ses cheveux soigneusement peignés.  A ses côtés une autre fille, un peu plus grande avec de longues nattes brunes.

La petite fille est toujours très souriante sur les photos.  Et sur celle-ci, ce grand garçon, presqu’un jeune homme, avec son bermuda et son veston qu’il est impressionnant avec ses lunettes à monture épaisse.

Et sur celle-ci.  Ce petit garçon.  Un béret sur la tête.  Une culotte courte et bouffante qui révèle des cuisses potelées.  Assis dans l’herbe, il adresse un regard inquiet au photographe.

Qui sont toutes ses personnes ? A qui sont toutes ses photos soigneusement rangées dans une valise ?

A y regarder de plus près, le visage de cette petite fille ne m’est pas inconnu.  Il me semble l’avoir déjà rencontrée.  Mais les autres alors ?  Eux je ne les connais pas.

Si.  Le jeune homme aux grosses lunettes m’est familier. Mais ce bermuda alors qu’il est si grand.  Il est mal à l’aise. Ca se voit au premier regard.  En même temps, je le comprends. Affublé de ce bermuda, à son âge.  Mais quel âge a-t-il ?

Une autre photo de la petite ballerine, un ruban blanc maintient ses cheveux vers l’arrière.  Et celle-ci où elle se tient debout, fièrement à côté du même grand garçon aux lunettes, identique jusque dans sa pose sur le cliché où il apparaît seul.  Elle semble bien le connaître puisqu’elle le tient par la main.  Pourtant lui, je ne l’ai jamais vu.  Je le saurais si c’était le cas puisqu’il ressemble au roi Baudouin.

J’ai été longue à trouver le sommeil.  Toutes ces photos en noir et blanc qui se succèdent en un ballet incessant.  Le sourire de la petite fille, le tailleur de la grande dame, le monsieur au costume clair.  Quand enfin mes paupières ont daigné se fermer, la petite fille a quitté son immobilité et s’est mise à danser, en noir et blanc, sous les applaudissements de tout ce petit monde de papier.  Le jeune homme au bermuda est venu me dire bonjour d’une voix très douce.  Il portait le chapeau de la grande dame qu’il a appelé maman. La musique s’est arrêtée, la petite fille s’est laissée glissée sur le sol gracieusement et s’est repliée sur elle même, comme dans le « Lac des Cygnes », les mains en couronne.  Les applaudissements ont cessé.  La scène a disparu.  Je n’entendais plus qu’un sanglot, celui de la petite fille.

Je me suis éveillée le visage lavé de larmes, maman était penchée sur moi.  « Tu as fais un cauchemar » m’a-t-elle rassurée en essuyant mes yeux.  « Tu vas te rendormir et tout ira bien ».  La petite fille avait complètement disparue.  

 

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